Besoin d'en parler

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Kawette9917
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Enregistré le : 15 mars 2021, 13:07

Besoin d'en parler

Message par Kawette9917 »

Bonjour,
Nous sommes tous et toutes là pour sensiblement les mêmes raisons j'imagine, alors mon histoire ne vous semblera peut-être pas très intéressante, mais en désespoir de cause, je me dis que la partager m'aidera peut-être. Ça mettra au moins des mots dessus…

J'ai 37 ans et atteinte de troubles alimentaires depuis 2016.
D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été un peu rondouillarde (mais t'es très grande alors ça passe…) et complexée, mais ça ne me gâchais pas la vie non plus. Un petit régime de temps en temps, une perte de poids assez balaise après ma grossesse, puis reprise de quelques kilos, reperte, reprise… Yoyo bonjour ! ;)

En 2016 j'ai vécu une rupture sentimentale assez houleuse et explosive. Je me suis retrouvée seule avec ma fille de 6 ans à l'époque, à 200 bornes de ma famille et sans amis. Vraiment SEULE. J'avais heureusement mon travail, qui me permettais d'avoir un semblant de vie sociale, et me suis raccrochée comme une perdue à un homme qui me tournait autour depuis un moment. Mon sauveur, celui qui me sortirait de ma solitude, mon héro… Qui m'a clairement achevée… Une nouvelle rupture, douloureuse, cruelle et terriblement humiliante.
Et comme d'un claquement de doigt, j'ai sombré dans l'anorexie.
Mais je le vivais super bien. Je n'avais pas l'impression de me priver, je n'avais simplement pas faim. J'ai très vite commencé à mincir, et évidemment ça m'a plu. Je me suis mise à me peser tous les jours, et tous les jours c’était un kiff absolu de voir le chiffre descendre. J’avais le contrôle là-dessus, je me sentais puissante. Il m’a fallu dépenser des fortunes pour refaire mon dressing, je suis passée d’un bon... à un... . J’ai perdu.. kg en à peine 2 mois, puis me suis « amusée » à stabiliser ça pendant plus d’un an. Je me lançais des défis, « voyons si je peux atteindre... kg », « Ha mais j’aime pas les chiffres impairs, on va faire... », « pourquoi ne pas tomber à... ? », « Et même... , histoire de virer le.. devant »… Bref, n’importe quoi.
On a commencé à s’inquiéter pour moi, me faire remarquer que je devenais trop maigre, que ce n’était même plus joli, que je n’avais plus aucune forme. Ma gynécologue n’a pas été surprise quand je lui ai expliqué que je n’avais plus mes règles (j’ai fait 1 an d’aménorrhée). Mais je m’en fichais : je rentrais dans du... !! C’était une vraie obsession. Je savais que je me mettais en danger, mais je me sentais belle, et avait foi en ma condition physique. J’ai en effet la chance de plutôt bien supporter ce genre de traitement, je n’ai jamais été hospitalisée, n’ai jamais fait de malaise, etc…
Fin 2017 j’ai été invitée à passer les fêtes avec ma famille. Les fêtes et leurs excès… J’ai renoué avec le gras et le sucre sans me rendre compte de ce que cela impliquait. Mon corps s’est soudain souvenu des plaisirs de la bouffe, et n’en a plus jamais eu assez. C’est là qu’ont commencé les compulsions alimentaires, et qu’elles ne m’ont plus quitté depuis. Hyperphagie, c’est-à-dire boulimie non vomitive : hé oui, je garde tout. Depuis toute petite je ne supporte pas de vomir. J’ai tenté quelques fois mais rien à faire. Je me dis que c’est sans doute pas plus mal : on évitera de rajouter un problème sur un problème…
Mais j’ai du coup évidemment reprit une 15aine de kilos, que je ne supporte pas.

Aujourd’hui je mesure... et pèse... kg. Je sais que tout est dans ma tête. Je sais que je ne suis pas « grosse ». Je sais que ce n’est une question de regard sur soi, qu’il faut s’accepter comme on est, que la femme est belle avec des formes, etc… Je sais, je sais, JE SAIS. Mais je ne m’y fais pas. Il m’est insupportable de me regarder nue dans un miroir, je me trouve immonde et ne me reconnait pas. Je porte tous les jours le même jeans taille... (bien détendu, presque... hein) et pleure tous les jours devant ma penderie de pantalons... , que je me refuse à remplacer. Ce n’est pas qu’une question de « grosse » ou « pas grosse », c’est surtout identitaire. Je n’ai plus l’impression d’être moi. Je ne peux plus m’habiller dans le style qui me plait, j’adapte mes vêtements à mon corps et non pas à mes goûts. Impression de ne plus pouvoir juste être moi-même et de composer avec le corps d’une autre.

Cela fait maintenant 3 ans que je ne m’alimente pas de la journée, rien du tout, que dalle, nada ; pour reperdre quelques kilos, et que je m’applique à faire un repas relativement équilibré (light quoi) le soir.
Mais tous les soirs, une fois que ma fille est couchée et que je me retrouve seule avec moi-même et ma télé, calée dans le fond de mon canapé, la crise arrive. Et là c’est festival. Paquets de gâteaux entier, tablettes de chocolat noir, au lait, blanc. Parfois 2, parfois 3 ! Pot de pâte à tartiner à la petite cuillère, pot de miel même ! Briquette de crème liquide (que j’achète allégée tout de même, rhaaaa la blague…), tartines de pain de mie avec du beurre, ou même du beurre de cacahuète. Une, puis 2, puis 3 puis tout le paquet ! Je ne m’arrête qu’une fois que j’ai mal au ventre.
Mal de ventre qui me poursuit évidemment toute la journée du lendemain, où je me prive non seulement pour « rattraper les dégâts » mais surtout parce que je ne peux plus rien avaler, je me souviens encore du goût de tout ce que j’ai avalé la veille et j’ai la nausée toute la journée.

Ca me plombe le moral et joue aussi sur mon humeur. Les lendemains de crise c’est soupe à la grimace. Parce que j’ai mal, parce que je m’inquiète pour ma santé (peut-on ingurgiter de telles quantités de sucre si régulièrement et continuer à ignorer les risques de diabète ?), et surtout parce que j’ai HONTE. Parce que je me déteste, je me dégoute, je m’auto-insulte de grosse vache et de tarée. Tous les jours je me dis que c’est la bonne, ce soir il n’y aura pas de crise, d’ailleurs là j’ai même pas envie. Et tous les jours ou presque, tout recommence, exactement comme la veille. Et je grossi au lieu de mincir, et je ne sors plus, et je ne partage même plus un repas correct avec ma fille, et chaque invitation à déjeuner est un « problème » pour lequel je dois trouver des excuses. Je ne sais même plus faire mes courses, parce qu’il faut que je compose avec les besoins de ma fille (qui est toute crevette et n’a à se priver de rien) et avec mes problèmes.

J’essaie de compenser avec un peu d’activité physique, mais je bosse dans un bureau de 8h à 17h30… J’essaie de beaucoup marcher, de danser, de sauter, de bouger. La vérité c’est que je me flingue surtout les articulations, déjà fragiles de base…

Bref, clairement je n’en peux plus. J’ai conscience de gâcher énormément de choses alors qu’il me suffirait simplement de reprendre une alimentation saine et normale, rétablir mes rythmes biologiques, toussa toussa... Mais je n’y arrive pas. J’essaie toujours de m’emmener de quoi manger le midi au boulot, mais chaque midi ça reste dans mon sac. Le soir quand la crise arrive, c’est tout le contraire de ce contrôle absolu que j’avais lors de ma période anorexique. Il n’y a justement plus de contrôle, je ne maitrise plus rien, je me retrouve esclave de mon cerveau qui disjoncte complètement. Au moment où cela se produit, j’ai conscience que je vais le regretter. Je regarde mon jeans prêt pour le lendemain sur ma chaise en le maudissant, en sachant que je devrais encore le supporter parce que je ne rentre plus dans rien d’autre. Je sais que j’aurais mal au ventre, je sais que je serais de mauvaise humeur, que j’aurais le teint gris et des cernes de malade sous les yeux. Mais rien ne me retient, mes mains attrapent les sucreries et les porte à ma bouche comme si ce n’était pas les miennes, c’est fou. Parfois parce que j'ai faim, parfois pas du tout, mais simplement pour m'occuper l'esprit, ou par habitude malsaine, ou par quête de plaisir.

Cela ne m’arrive que lorsque je suis seule. Quasi tout le temps en fait lol. Mais les rares fois où je suis accompagnée, tout se passe bien. Je ne pense même pas à faire une crise, les choses sont fluides, normales et naturelles, problème disparu, magie. Mais on ne peut pas solliciter des gens tout le temps, j’ai une vie plutôt casanière et isolée, il faut que je me dépatouille de ça toute seule.

Au bout de 2 ans j’en avais parlé à mon médecin. Ce gros débile pour qui rien n’est jamais grave. Il n’a pas du tout cerné le problème et m’a juste donné un cours de diététique, métabolisme, hypo/hyperglycémie… Rien que je ne savais déjà. A aucun moment il ne lui est venu à l’esprit de simplement m’orienter vers un psy. Lors de la consultation suivante, pour ma fille cette fois à qui il faisait une petite morale sur les sucreries, il s’était même permis un « Hein que c’est pas bon les sucreries le soir, n’est-ce-pas la maman ? »
Okéééééé… :roll:
J’en ai parlé à un autre médecin, qui a simplement voulu me prescrire des anti-dépresseurs, que j’ai refusé.
J’ai fini par me prendre moi-même un rendez-vous avec un psy. Mais ce n’était sans doute pas le bon, je suis sortie d’une première consult’ sans pouvoir lui parler réellement du problème et avec l’envie de lui coller 2 baffes :roll:

Depuis j’ai abandonné l’idée de me faire aider, manifestement il faut vraiment tout faire toute seule dans cette vie. Chose à laquelle je suis pourtant habituée maintenant, et que je ne vis pas si mal. Mais « CA », je n’y arrive pas. C’est la première fois de ma vie que je me sens si faible et impuissante, face à quelque chose que je ne sais pas solutionner. Je suis moralement épuisée et ne sait plus comment faire face. J’ai une amie avec qui j’arrive à en parler et qui me soutient de tout son cœur, mais complètement étrangère à ce genre de problème donc elle ne comprend pas.

Merci à qui aura eu le courage de me lire. Si seulement réussir à coucher ça par écrit pouvait m’apporter un début de solution…
Sandy32
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Re: Besoin d'en parler

Message par Sandy32 »

Bonjour, je viens de te lire... Quel courage tu as de te battre chaque jour, pour aller travailler, t'occuper de ta fille... Moi c'est ma fille de 13 ans qui est anorexique, et c'est autre chose.. Voilà, je ne sais pas comment t'aider, et en même temps je ne pouvais pas te lire sans te répondre. Il y a forcément qq'un d'adapté à tes besoins près de chez toi, pas un généraliste, mais peut-être un hypnotiseur, ou un psychiatre, ou une consultation en hôpital qui pourrait te mettre sur le chemin de la guérison. Courage, vraiment, tu es jeune et la vie vaut le coup ! Je t'envoie des bisous de soutien
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