retour d'une revenante...guérie!!!

[lasco]

Bonjour à tous,
Je suis longtemps venue sur Enfine, avec plusieurs interruptions dues à des hospitalisations ou à un simple désir de prendre du recul.
Enfine m’a aidée à mettre des mots sur l’indicible, à hurler ma rage de destruction et celle de vivre. J’y ai reçu une écoute précieuse, j’ai appris que je n’étais pas la seule à vivre ce quotidien infernal, que j’étais loin d’être unique.
Cela a duré plus de trois ans. Trois ans de galère indicible, d’anorexie-boulimie à tous les sens du terme. J’ai exploré ces maladies en long, large et travers. Je les ai faites miennes, je les ai incarnées.
Pendant trois ans, je me suis résumée à cela, à ces deux mots qui me hantaient et ne me laissaient aucun répit.
Aujourd’hui, je vais bien ! Je suis guérie, je suis devenue autre chose que les TCA. Le mot « femme » me terrifiait, je le revendique désormais avec plaisir.
Parfois, il m’arrive d’avoir des compulsions et de vomir, mais elles s’estompent et depuis presque un an de « convalescence », je fais de plus en plus de progrès.
Je n’ai pas trop envie de décrire l’enfer que j’ai traversé parce qu’ici, il n’a rien d’extraordinaire et je n’ai rien à prouver. Non, je voulais juste revenir pour remercier enfine du soutien que j’ai reçu lors de ma maladie. On se méfie toujours d’internet mais ce site est à dimension humaine et il fait des choses magnifiques. J’ai vu enfine démarrer, avec son forum rouge et jaune ( par pitié, ne choisissez plus ces couleurs !) et j’ai assisté à la mise en place de l’association.
Je n’ai jamais vraiment voulu m’impliquer, parce que j’avais peur de trop m’y attacher et d’oublier de guérir. C’est la raison pour laquelle je n’ai jamais adhéré. Mais quand je vois ce qui est proposé, je trouve cela génial.
Cela fait longtemps que je voulais écrire ce post pour dire qu’on peut s’en sortir, que la sortie du tunnel existe et que la lumière est réellement éclatante et merveilleuse. Lorsque j’étais au plus mal, je me désespérais d’y parvenir et je partais à la recherche de messages me prouvant le contraire. Je rêvais du jour où j’écrirais le mien, où je dirais que la vie est fantastique et que grandir n’est pas insurmontable. Que le monde des adultes vaut la peine d’être vécu.
Donc, voici MON post sur la guérison !

Je suis tombée vraiment malade à 18 ans. Mon adolescence avait déjà été ponctuée de rapports pathologiques à la nourriture, mais elle s’était déroulée sans trop de heurts. Je tenais pour ma famille, pour ma mère surtout. (hé oui, je rentre en plein dans le schéma typique… !!!)
A 17 ans, je rentre à la fac. Je suis tiraillée entre un violent appétit de vivre, de rentrer dans la cour des « grands » et une terrible culpabilité de devoir abandonner ma mère et ma petite sœur.
Un an plus tard, c’est le drame familial, ma mère sombre dans une dépression violente et hystérique. Je suis seule face à elle et je ne tiens plus. Un soir, je décide de vomir mon repas, puis tout ce qui daigne entrer dans mon estomac. Je me dope aux vomissements parce que je ne supporte plus rien, pas la moindre pomme, et que j’ai besoin de cette violence.
A l’époque, je ne comprends pas d’où vient ce refus de la nourriture, pourquoi il me donne la sensation de lutter contre ma situation familiale et de me purifier d’abus.
D’ailleurs, parlons en de ces abus…J’avais déjà essayé de m’en sortir, j’étais allée voir un psy. Mais il n’a fait que me renvoyer ma propre violence en pleine face, je m’étais plantée d’adresse. J’ai plongé deux jours après avoir annulé tous mes RDV.
Je m’enfonce dans une dépression obstinée, je deviens muette, hargneuse, obsédée par la nourriture et la balance. Mes amis tentent de comprendre, de me remettre les idées en place et de me retenir dans cette chute libre. En vain. Je les repousse, plus rien n’a d’importance. Plus tard, certains m’ont parlé de leur sentiment d’impuissante face à cette autodestruction exhibée. Ils se sont sentis désarmés, repoussés. Et pourtant, intérieurement, je continuais de les aimer et d’avoir besoin d’eux. Je me suis repliée sur moi-même, pour être tranquille, pour pouvoir me foutre en l’air tranquillement.
Enfin, à l’époque, je veux juste maigrir et réussir mon année. Après, on verra. Ah Oui ! « Il faut aussi que je tienne pour ma mère, parce que sinon, je vais l’achever »…No comment.
Mais ma mère a tout compris dès le début. On joue aux idiotes, je dénie me faire vomir et je me cache derrière des pyjamas ultra larges dès mon retour de la fac. Je rentre tard pour sauter le plus de repas possible.
Je vomis partout, au mac do, à l’université, à la bibliothèque, chez les gens…Je refuse de manger devant les autres, c’est la pire des hontes pour moi, la pire des faiblesses. Je suis fière de me détruire, d’avoir cette capacité à me priver de tout. Je suis persuadée qu’ils m’envient, que je suis mieux qu’eux, parce que moi, j’ai de la volonté. Moi, je sais me priver. Moi, je sais maigrir et je ne fais pas 46 régimes qui ne servent à rien. Moi, je ne me plains pas de la faim, je n’ose même pas y penser. Et si cette idée ose parfois me traverser la tête, je m’en veux à mourir. Je n’ai pas le droit de me plaindre, surtout pas d’avoir faim. Mais, au début, mon corps n’est pas habitué à un tel rythme et il me lâche souvent. De cela, oui, je me plains. Pourquoi ne tient-il pas debout tout seul ? Y a t il un moyen pour arrêter d’avoir des vertiges. Et c’est quoi ce truc qui m’entoure et qui ne m’apporte que des angoisses ? Pourquoi il ne disparaît pas ? Je le hais, je me hais et je hais les autres. Tout n’est plus que haine et violence.

Cependant, malgré tout cela, je suis consciente de ce qui m’arrive, je devine avoir des problèmes alimentaires sans oser mettre des mots dessus, ce serait bien trop prétentieux.
Une amie en psycho m’écoute et me guide vers un centre spécialisé.
Le RDV se rapproche, je ne veux pas y aller mais je me dis qu’il faudra bien que je m’en sorte un jour. Pour mes parents. Alors, je me présente au psychiatre. Cela ne fait que quelques mois que je suis « malade ». Heureusement…Aujourd’hui, je remercie le ciel d’y être allée aussi vite. Je crois que c’était un simple instinct de survie. Je voulais pas crever, pas maintenant, pas à 18 ans. J’avais une envie de vivre qui me dévorait. Elle m’effrayait plus qu’autre chose. Mes grands rêves me semblaient inaccessibles… Le but de ma destruction était de pouvoir renaître sur des bases nouvelles, d’éradiquer les ratés de mon enfance et de pouvoir entrer pure et armée chez les adultes. Je voulais être quelqu’un d’autre, me redessiner avec des contours plus jolis, exempts de la moindre faiblesse.
Un désir absolu de perfection et de pureté…

Pardon, je me rends compte que je commence à détailler ma maladie et à ce rythme, je n’aurais jamais fini ce post !
Donc, je vais résumer…
Je finis par démarrer une première thérapie qui me fait basculer d’une conduite anorexique à des crises de boulimie. Mon poids stagne et cesse de baisser mais je suis quand même hospitalisée car cela ne va pas mieux. Au contraire. Mes parents sont anéantis mais reprennent peu à peu leurs responsabilités et me soutiennent. Je recommence à respirer. Enfin, à hoqueter plutôt, parce que rien n’est encore gagné. Je fais plusieurs TS, une à chaque fois que mon corps passe la barre des 50 kg. Que la balance affiche un « 4 », passe encore, (et encore…je préfère de loin le « 3 » !) mais le « 5 », c’est hors de question. Alors, à chaque fois, je me punis, je veux faire encore plus mal. Je me sens dans une impasse, alors j’avale des médicaments sur un coup de tête. Je ne cherche plus la logique, parce qu’ il n’y aucun sens dans ce monde de folie alimentaire.
Après 8 mois passé dans une clinique médico-universitaire, je craque. Je sens que je m’enfonce chaque jour davantage…Je visionne « family life » de Ken Lodge, un film retraçant le piège de la psychiatrie et la descente dans la folie d’une jeune fille paumée à peine sortie de l’adolescence. Je panique, je ne veux pas devenir comme ça.
Là-bas, on me dopait aux médicaments, c’était la seule réponse que je recevais face à ma détresse. « Avale, tais toi et ça ira mieux ». Alors, je faisais semblant de les prendre, les stockais, et les revendais pour me payer mes crises ou les prenais d’un coup pour tout oublier quelques heures…Je suis au fond du trou.
Bref, un après-midi, je n’en peux plus, je songe à me couper, puis je me dis que je ferais mieux de partir…Je prends un sac à dos, et je rentre chez mes parents ! Bien sûr, cela ne se passe pas comme ça normalement, on prépare sa sortie, une hospitalisation ne doit pas se terminer sur un coup de tête. Mais encore une fois, j’ai juste écouté cette petite voix de survie…
Ironie de l’histoire, j’avais RDV à Cochin pour préparer une hospitalisation, plus courte cette fois-ci ! J’y vais, je fais confiance au médecin de là-bas, et j’y place une seconde fois des milliards d’espoirs. Echec à nouveau, la boulimie résiste. Je suis en pleine reprise de poids, c’est l ‘horreur. Cela fait 2 ans que j’ai arrêté mes études, que je suis incapable d’ouvrir un livre correspondant à ma licence. Mes parents ne supportent plus mon inertie, d’assister impuissants à cette léthargie morbide. Mon quotidien les use jusqu’au bout, ils craquent. De leur côté, ils ont repris une vraie vie de famille, en grande partie pour moi, même s’ils diront toujours le contraire. J’ai fait exploser une à une toutes les failles familiales. Je n’avais plus le choix il me semble.
Bref, je trouve un studio. Je continue d’être suivie dans ce centre spécialisé par le même psychiatre. Cela n’a pas toujours été facile mais j’ai tenu à chaque fois parque je savais que c’était mon seul repère, qu’une guérison se construit avec l’aide de spécialistes et avec un travail profond et continu sur soi. J’ai souvent grincé des dents au début mais j’ai continué ces entretiens. Et aujourd’hui, je sais que ce que je leur dois…
Une fois le domicile parental quitté, j’ai pris peu à peu conscience des responsabilités que j’avais envers moi-même. Je me suis forcée à remanger normalement. Ce ne fut pas simple, mon estomac souffrait le martyr mais g tenu bon. Et les crises se sont estompées. Je me suis mise à sortir sans arrêt pour lutter contre la dépression, contre les 25 kg de repris(certes, j’en avais besoin ! Mais 25 en 3 ou 4 mois…).
Mon premier amour débarque à paris et je retombe amoureuse. Je touche du doigt ma guérison. Elle est venue d’un coup, comme si tout le travail psychologique, toutes les épreuves traversée avaient mûri en silence et s’étaient révélées un beau matin.
Depuis presqu’un an maintenant, je vais très très très très très bien. Les TCA appartiennent au passé, ils font partie de moi, mais je ne me résume pas à eux. J’ai réappris à aimer mon corps, à le considérer et à en prendre soin. J’ai repris mes études, je sais où j’en suis et je construis un avenir solide(du moins je le crois !!!).
Oui, je suis heureuse et fière de m’en être sortie. Bien sûr, il reste des angoisses, il reste un manque de confiance en soi et encore plein d’autres choses à régler, mais je continue ma thérapie et je suis certaine de ne plus jamais revenir en arrière.
Peut être qu’il s’agissait d’un passage obligé pour grandir. Ou peut être que j’aurais pu éviter toutes ces horreurs…
La mue fut difficile, j’aurais versé des larmes et des larmes. Mais je crois que cette maladie m’a empêchée de devenir folle à l’époque. La douleur était trop brûlante, il fallait absolument que j’en fasse quelque chose. J’ai lutté du mieux que j’ai pu et ce que j’en retiens, c’est qu’on ne s’en sort jamais seul. Alors, ne refusez surtout pas le bras qu’on vous tend et allez le chercher vous-même. N’oubliez pas que cet enfer a une fin, et qu’il faut toujours y croire, garder espoir.
Bon courage à tous ceux qui souffrent encore ici. Apprenez à vous aimer et à aimer ce qui vous entoure…
Et merci à Cath et les autres…merci infiniment !

[nouchka]

Merci pour l'espoir que tu donnes.
Merci, et belle vie à toi.
Ma fille est malade - ahh, que je n'aime pas ce mot ! et ce que tu viens de raconter m'aide beaucoup, pour l'attitude que je dois avoir, oh, je ne sais pas, tu me redonnes espoir, voilà.
merci encore.

[kilou]

je t'ai lu, croisé...
je n'oublie pas...
peu de mots, mais bcp d'étoiles ds un regard...
merci

[Elodie]

Contente de voir cette belle évolution...
Bienvenue dans un monde nouveau... !
Bises,
Elo.

[Ellaile]

[elween]

Bravo, et merci pour ce beau message.
Ca redonne de l'espoir...

Gros bisous

[audrey_64]

merci pour ce message plein d'espoir et qui redonne l'envie de se battre alors que l'on est dans une mauvaise passe et bravo à toi e te souhaite une très belle vie pleine de bonnes choses!!!!!!!!!!!
et bien je suppose donc qu'il n'est sans doute pas impossible de s'en sortir grace à ton post plein d'espoir.

merci du fond du coeur!

amicalement,
audrey

[Meleva]

Tout d'abord bravo!!

Je te remercie d'être revenue sur le forum pour nous faire part de ton évolution car il ne faut pas oublier que la guérison est possible pour chacun d'entre nous

je t'embrasse
mél

[Angee]

merci et bravo!!!!!

[Corneille]

Je suis trop fière pour toi. TU es trop forte. Tu es SUPER.
J'ai vu sur la 5 dimanche dans "Arret sur image", Chloé, une ex ano-boulimique qui s'en est sortie également.
Vous êtes formidables et je vous admires.
J'espère un jour vous rejoindre au lieu de rester dans ma bulle de souffrance
Plein de bonheur à toi

[lasco]

je viens de revenir sur le net alors je voulais juste faire un bisous à toutes ...
meuh, corneille, suis pas extraordinaire! la guérison, on finit tous par y passer un jour!!!!! (enfin, si on le veut, bien sûr!!!) 8-)
bizzzzzzzzzzzzz du sud de la france
lasco

[Petite_etoile]

Touchant et rempli de courage ce témoignage! Merci!

[petipiou]

ça fait plaisir de te lire Lasco... ;-)
Bisous,

[Gwen]

merci bcp pour ce témoignage d'espoir, ça fait du bien de savoir qu'on peut s'en sortir et comme tu le dit, encore faut il le vouloir!! Et c'est peut etre ça le plus dur!!
Bisous et bonne continuation
Gwen

[Meleva]

[Ellaile]

Pour donner du courage ... merci Lasco.

[prudence]

Tu as bien fait de faire remonter ce post Laurence. Je l'ai lu ou relu (je ne sais plus si je l'avais déjà lu) et il me conforte dans l'espoir que mes psychothérapies successives (si on peut dire successives...puisqu'on ne repart jamais de zéro..) portent enfin leurs fruits, des fruits éternels qui enfin ne commenceront pas à pourir d'une manière ou d'une autre après quelques mois.
Je veux y croire encore, j'y crois encore, et maintenant que j'ai lu, Lasco, comment tu es allée mieux, je pense que j'ai raison d'y croire...
Merci.
J'espère que tu continues sur ta lancée et que tu vas toujours aussi bien.
Prudence

[maloute]

merci.

[nouchka]

" Je continue d’être suivie dans ce centre spécialisé par le même psychiatre. Cela n’a pas toujours été facile mais j’ai tenu à chaque fois parque je savais que c’était mon seul repère, qu’une guérison se construit avec l’aide de spécialistes et avec un travail profond et continu sur soi. J’ai souvent grincé des dents au début mais j’ai continué ces entretiens. Et aujourd’hui, je sais que ce que je leur dois… "

Je ne sais pas faire les citations, humm!
Enfin c'était juste pour jeter un clin d'oeil à laurence, qui persiste à croire qu'elle pourra s'en sortir toute seule..

Voilà. Bonjour à tous, et c'est vrai que ce post donne du courage. Mais on n'a rien sans rien, pas vrai?
Je voudrais même rajouter : méfiez-vous de l'aide des gens lambda, elle peut être pire que rien du tout.

[Ellaile]

Ce n'est pas la prétention de pouvoir m'en sortir seule... c'est la conviction -probablement à tort- que déballer ma vie à psy qui m'écoute ne résoudra pas mes comportements alimentaires, puis maintenant le poids est là, trop.

Et oui on n'a rien sans rien,
ça doit venir de nous aussi... enfin je suis le contre-exemple.
Bref. Merci.

[nouchka]

ouaimhh..
C'est pas encore toi qui a démontré qu'on pouvait s'en sortir tout seul, n'est-ce pas? Tu n'es donc pas un contre exemple, sorry, my dear!
Affectueusement.