Besoin d'échanger autour de la boulimie...

[Lollie]

Bonjour,

Je suis toute nouvelle ici et j'ai 35 ans. Je suis mariée, j'ai 2 enfants et je souffre de TCA depuis ma tendre enfance...
C'est à dire depuis que j'ai 8-9 ans (donc oui, ça date de trèèèèès longtemps!).

Petite, j'étais très maigre car je ne voulais pas me nourrir. Je recrachais le maximum de bouchées dans les toilettes ou dans la poubelle de cuisine... J'étais danseuse classique avec 8h de danse/semaine. C'était ma passion et du coup, je ne m'adonnais qu'à cela. Et plus on est légère > mieux c'est perçu dans ce milieu... Je me suis faite virée 2 fois de la cantine scolaire car je n'y mangeais rien du tout et personne n'arrivais à me faire avaler mes repas. Pareil chez les nourrices qui finissaient par refuser de m'accueillir sur les temps du midi. Donc ma mère se dépatouillait tant bien que mal avec ma grand-mère pour ses temps là ou je rentrais le midi seule à la maison... On me forçait a rester à table, à finir mon repas et je refusais ce qui créait de gros conflits entre moi et mes parents; Ils ont tenté plus d'une fois de me laisser plusieurs heures devant mon assiette, de me menacer, m'ont fichu des fessées ou des gifles car je refusais de manger. Dés que je mangeais un repas, mon ventre se tordait de douleurs et je devais rester allongée plusieurs heures en souffrant tellement j'avais mal. Je ne mangeais ni gâteaux, ni bonbons non plus. JE NE MANGEAIS RIEN. Je pouvais me nourrir uniquement de 3 petits poids...Ca rendait folle ma mère, notre généraliste, ma grand-mère et mes tantes. Mais c'était ainsi.

Puis à l'adolescence, j'ai eu différents soucis qui ont entrainé des envies compulsives et obsédantes de nourriture... J'avais un peu d'argent de poche, donc je le dépensais en intégralité en sortant de l'école pour aller m'acheter des paquets de gateaux que j'avais le plus vite possible, cachée dans un coin avant de rentrer à la maison... Puis j'ai commencé à vider les placards chez mes parents aussi... Mais en cachette, toujours. Je cachais ensuite les paquets vides sous les meubles, les lits et ma mère tombait dessus et me fâchait... Etant à la base très maigre, ses kilos prit n'ont pas été très gênants... Ils ont développé de la poitrine que je n'avais pas du tout. Je me sentais alors plus féminine car on me reprochais d'être trop maigre... J'avais trouvé un moyen de devenir plus jolie!

Mais petit à petit, ses crises se sont accentuées... Ensuite mon argent de poche me servait à aller chez Quick et à manger une 12aines de cheeseburgers et mettant en place une espèce de concours avec mes copines et où je gagnais haut la main (et je satisfaisais en même temps mon envie de gavage). Là encore, c'était des sorties en cachette l'après-midi et mes parents n'étaient absolument pas au courant de cela... Manquant d'argent de poche pour m'acheter mes nourritures, j'ai commencé à voler dans les réserves d'argent de mes parents. Ma mère a fini par s'en apercevoir mais je n'ai jamais pu lui avouer à quoi je dépensais ses sous... Je lui ai donc menti plusieurs fois. J'avais honte de ses comportements de gavage. Après ses "crises", j'allais très mal et ensuite je sautais des repas et m'adonnais intensément à mon sport fétiche > la danse, à haute dose d'entrainement (j'avais installée une barre dans ma chambre avec un miroir pour m'entrainer).

Ainsi, pendant plusieurs années, j'ai eu des périodes de boulimie, d'hyperphagie et d'anorexie me permettant de garder le contrôle de mon poids sans soucis. Du coup, hormis la honte et la culpabilité de ses comportements que je savais mauvais pour ma santé, ça ne se voyait pas du tout. Je restais jolie avec un poids plutôt standard, avec de jolies formes.

Mais une rupture amoureuse (on devait se marier, ma robe était achetée et le traiteur réservé, salle aussi ect.) m'a entrainé dans une dépression profonde avec tentatives de suicide... De là, un traitement sous AD a été mis en place. J'ai perdu une quinzaine de kilos en l'espace de 2 mois. Je n'étais plus rien... Le vide. Le néant. Je n'avais plus d'envie de vivre...

Puis c'est dans cette période noire que j'ai retrouvé mon amour de jeunesse et c'est lui qui m'a redonné mon premier sourire... Et c'est devenu mon mari et père de mes enfants quelques années plus tard.

Ma première grossesse s'est bien passée, j'avais pris que 9kg. Une jolie petite fille est née en 2007. J'avais toujours des comportements boulimiques que je cachais puisque je les ai toujours assouvis seule (soit quand mon mari était absent et étant cheminot, j'avais de grandes plages horaires pour m'adonner à mes compulsions, soit la nuit quand il dormait).

Seulement, je n'ai pas accepté mon corps après la naissance de ma fille. Mon ventre avait un léger tablier abdominal et je me trouvais ignoble, dégoutante de graisses... Mais je n'avais qu'un léger surpoids à ce moment là pourtant. Rien de bien méchant mais celà m'a fait rechuté dans la depression qui fût costaude...

Je suis retombée enceinte 4 mois après la naissance de ma fille. Mon fils est né en 2008.

Là encore, la depression m'a rattrapé car je ne supportais plus mon corps, trop abimé par les grossesses très rapprochées. J'étais épuisée en plus car j'avais vécu des accouchements très traumatiques avec des hémorragies de la délivrance. Mon petit garçon avait faillit mourir lors de l'accouchement.

J'ai perdu rapidement tous mes kilos de grossesse en pratiquant un régime extrêmement restrictif et du sport à haute dose. Je prenais aussi des cachets pour me faire maigrir plus vite, des sachets hyperprotéinés ect.
J'ai donc ensuite pu être opérée d'une abdominoplastie car j'avais retrouvé un poids de forme satisfaisant pour subir l'opération. Elle fût prise en charge par la Sécurité Sociale car le tablier abdominal était bien présent et j'avais un diastasis de 12cm de chaque côté des muscles grands droits. L'opération fût très lourde et dura plus de 5h (normalement elle dure 2h30 maxi)

Après cette intervention, je me sentais mieux, j'avais retrouvé mon corps. J'en prenais grand soin avec une alimentation extrêmement équilibrée, des soins corporels ect.

Seulement, quelques mois après, j'appris que mon fils souffrait d'autisme typique sévère. Il avait 2,5 ans à ce moment là. Et là... Ce fût à nouveau la descente aux enfers... La depression ressurgit plus forte que jamais... Un trou béant dans mon coeur de maman. Ca touchait la chair de ma chair. C'était très injuste et j'avais si mal.

S'en suivi des années sans dormir à cause de ses troubles du sommeil, de mes propres insomnies et inquiétudes, recherches sur le net pour l'aider au mieux, trouver des solutions à cet enfer que l'on vivait... Et là les crises de boulimie se sont intensifiées +++ et l'hyperphagie a aussi commencé, ce qui a fait que même mes périodes de jeûne/d'hyperactivité ne suffisaient plus à contrôler mon poids... Et j'ai pris [...] de tristesse.

Je suis donc montée jusqu'à [...]. Une horreur. Impensable pour moi... 3 chiffres... J'en revenais pas. Je pleurais toutes les nuits de honte. Et un jour j'ai décidé d'avouer mon poids à mon mari en montant devant lui sur la balance (car physiquement, dû à l'abdominoplastie, je parais plus aux alentour de [...] maxi). Il n'en revenait pas et a enfin ouvert les yeux sur ma grande souffrance. J'étais nue, face à lui, sur ma balance et en pleurs. Je lui dévoilais en partie la plus honteuse partie de moi...

J'ai décidé de m'en sortir, de ne plus revoir ce chiffre. Alors j'ai recommencé les régimes restrictifs et hypocaloriques, le sport à haute dose et les médicaments. J'ai perdu [...] très rapidement.

Mais mon fils a reçu entre-temps d'autres diagnostics complémentaires qu'il a fallut que "j'avale"... Un diagnostic de TDAH s'est ajouté rapidement à celui d'autisme et il a fallut le mettre sous différents traitements. Lui aussi a des troubles alimentaires (il a un Pica, comportement boulimique avec vomissements et hyperselectivité alimentaire sévère avec des troubles de l'oralité), un diagnostic de dyspraxie sévère et un diagnostic de trouble de la marche où il doit subir des traitements de plâtrages aux 2 jambes + appareillages au quotidien... Bref, des choses difficiles a entendre pour une maman qui se donne corps et âme pour ses petits.

J'ai donc repris rapidement mes kilos perdus [...] et a ce jour, j'oscille entre [...] selon les jours.

Suite a toutes ses variations de poids, ses restrictions, ses gavages ect. j'ai mis ma vie en danger... En Janvier 2016 j'ai fais un AIT (accident ischémique transitoire > petit AVC), j'ai désormais une ALD100% pour AVC, je suis sous traitement anti cholestérol, sous traitement anti-hypertension et sous aspirine + 2mg de [...] (AD au dosage prévu pour tenter de réduire les crises de boulimie). J'ai enfin décidé de me faire soigner. J'ai accepté le fait que j'étais malade et j'en ai parlé à mon médecin traitant qui m'a dit qu'effectivement je souffrais de boulimie.

Il m'a fait un courrier pour l'hôpital au mois de mai 2016 et par la suite, l'hôpital m'a orienté vers une association qui prends en charge les TCA sur Paris. Ils proposent une prise en charge pluridisciplinaire et j'ai passé mon bilan d'entretien initial au mois d'Août. Il apparait que je suis donc bien boulimique sélective avec hyperphagie et je navigue aussi par des périodes d'anorexies.

Ma prise en charge a réellement débuté fin Septembre. Je vois une psychologue dans le cadre d'une thérapie post traumatique (ils proposent plusieurs formes de thérapies comportementales ainsi que l'hypnose, EMDR, etc.), un suivi psychomotricité, groupes de paroles, suivi nutritionniste et des ateliers d'expressions corporelles.

Je ne sais pas si je vais m'en sortir... Mes TCA sont tellement vieux qu'ils sont devenus chroniques... C'est un dur combat et les récidives font peur. J'ai aussi dans ma famille des personnes qui souffrent de TCA (anorexie mentale sévère notamment > tantes et cousine, où certaines ont eu des hospitalisations longues durées)

Mais je veux aujourd'hui m'en sortir réellement. Mon AIT m'a fait extrêmement peur.

Pardon pour le pavé, je n'ai pas réussi à bien résumer ma problématique. Bon courage à celles et ceux qui le liront et merci à ceux qui prendront le temps de partager avec moi.

Lollie

[adora999]

Bonsoir,
Je suis impressionnée par ton honnêteté.
Je partage ta détresse étant moi-même dans une situation "similaire".
La vie ne t'a pas épargnée, la souffrance fait partie de ton "quotidien".
Le seul conseil que je pourrais te donner c'est de t'aimer et d'être tolérante envers toi-même.
Evidemment c'est plus facile à dire qu'à faire... J'en sais quelque chose.
Il faut absolument te faire aider par le corps médical, je sais par expérience que c'est NECESSAIRE et UTILE.
Je te souhaite bon courage pour ta guérison et félicitation pour tes merveilleux enfants.
La différence est une force.
Mes enfants c'est ce qui me fait tenir, ils sont ma plus grande fierté.
Un jour un ami qui a perdu sa femme emportée par un cancer m'a dit : " il n'y a pas de maman malade. Une maman ne peut pas être malade." Moi, ça m'a parlé et je me suis dit que je "devais" être forte pour protéger mes enfants. Ce sont parfois des phrases dites par un proche dans un contexte particulier qui nous font avancer et progresser.
En tout cas je te le souhaite de tout mon cœur.

[Tfnn]

Bonjour, ton témoignage m'a énormément touché. J'ai 21 ans et je souffre de troubles alimentaires depuis mes 12 ans approximativement. Je sens et sais que cela durera toute ma vie mais je commence à prendre peur pour ma santé.
@adora999, tu dis que le corps médical est nécessaire, je commence à me demander si je ne devrais pas faire quelque chose moi aussi. A savoir que mon entourage sait que j'ai déjà eu des troubles alimentaires et que j'ai des tendances dépressives mais actuellement ils ne savent pas que depuis environ 2 à 3 mois je suis redevenue boulimique vomitive, assez sévèrement d'ailleurs. Est-ce que tu pourrais approfondir sur à quel point le corps médical peut aider ? Ca m'aiderait grandement à mon tour.

Courage à vous deux. Je vous envoie beaucoup de tendresse.

[alterb]

@Tfnn Tout comme tout je me demande de plus en plus si j'ai pas besoin de consulter un spécialiste, je sens de plus en plus le besoin d'une aide extérieur parce que je m'engouffre de plus en plus dans la maladie.
J'ai eu une période de rémission pendant six mois, sans crise, puis ça a reprit, et depuis un an c'était de plus en plus fort et cette semaine fut plus que chaotique. Le seul problème, c'est le prix, sinon ça ferait longtemps que je serais allé voir un psy ..
On va essayer de s'en sortir, faut pas baisser les bras!
Courage à vous les filles, il faut continuer d'y croire

[hiverVolcanique]

Bonjour, je vois que vous vous posez la question de l'éventuelle nécessité de se faire aider par des spécialistes. Je suis également dans une phase où je m'interroge sur cela, car je me rend compte que toute seule je ne m'en sors pas. J'ai regardé ce film, un ensemble de témoignage de femmes ayant vécu la boulimie et s'en étant sortie (pour la plupart je crois) et ça m'a convaincue ; on peut s'en sortir, on peut se faire aider, on peut choisir de ne pas affronter ça tout seul. Voilà le film : http://www.boulimie.fr/video-boulimie/b ... t-therapie