Cette année elle est pour toi, je me suis battue aussi pour toi, parce que je ne veux pas garder en souvenir ces derniers instants trop durs qui t'ont poussé au pire.
Ce premier papier extirpé aux mains de l'hôpital c'est aussi une part de toi qui a gagné.
Je ne t'ai pas oublié, durant ces mois, parfois douloureusement, en enfilant ma tenue, en observant des patients , en apprenant toujours et toujours de nouvelles choses.
Et dans les sourires que je récoltais, dans les mains serrées je pensais que toi aussi tu aurais pu y être, connaître ces instants si gratifiants, si réels.
La réalité n'est pas là où on la pensait, la réalité n'est pas dans cet univers flou, aux limites mal définies, aux espoirs inateignables, aux peurs omniprésentes. la réalité tu ne l'a pas fuit au fond, tu n'y étais pas vraiment, on ne peut pas fuir quelque chose que l'on ne traverse pas... on ne peut qu'éviter d'y aller....
Plus de 6 mois maintenant, la moitié d'une année, les jours s'écoulent, les larmes se tarissent, le souvenir, les images restent. Au début il m'était inimaginable de concevoir ta perte, de continuer et surtout de me battre encore. Comment vivre quand on perd quelqu'un ainsi? comment?
Et pourtant les jours sont passés, l'inconcevable s'est fait au pris d'efforts, parfois d'arrêt pour souffler. Ce n'est pas t'oublier que de ne pas pleurer tous les jours, que de ne pas m'arrêter de vivre. C'est penser à toi que de vivre tous les jours, que d'avancer et accepter que tout au long de la vie il y aura des pertes, parfois dramatiques et soudaines...
Tu m'auras appris ça, encore une chose de plus, cette année n'aura pas été des meilleures côté perte.... mais combien de personnes sont encore là.
Combien de personnes sourient encore, se battent contre leur galère à elle, et m'envoient chaque jour des encouragements par leur comportement. Combien de jeunes Adeline je croise en traversant un trottoir, en entrant ds des services, en regardant l'eau le soir...
Chacune si différente et pourtant si semblable.
Ma vie est là, qui débute, cahoyiquement bien sûr, la maladie a ses empreintes en moi, bien ancrées et ne lâche pas si facilement.... il n'y a pas qu'elle j'ai ma part de responsabilité, je m'y raccroche aussi comme bouée quand la panique s'empare de moi, quand le stress m'enveloppe.... sale anxiolytique qui détruit au lieu de calmer.
Je le sais mes les pires habitudes sont dures à lâcher.
Et pourtant 10 mois sont passés, et pourtant l'an passé je n'aurais pas donné cher de ma peau, et pourtant il y a un an j'aurais voulu mourir, à tout prix, ne plus voir, ne plus tenter de rêver, ne plus exister... je m'étouffais seule, incapable de respirer, de rester à la surface... et chaque jour était enfer... et chaque jour je rendais ma vie encore plus dure.
La vie n'est pas un conte de fée, la vie n'est pas un miracle chaque jour, il y a eu des dizaines de jours (et bien plus) cette année où j'en ai voulu à la terre entière, où j'aurais envoyé balader bien des personnes si j'avais osé, où j'ai cru ne pas revoir de lumière.... et pourtant c'est bien la meilleure année depuis le début de la maladie, depuis plus de 10ans...
j'en ai bavé, j'ai pleuré, j'ai craqué par moments mais rien à faire, je ne voulais pas lâcher! j'aurais pu et certaines fois je n'en ai pas été loin, c'est tellement plus facile, tout arrêter encore... mais ces gens en face, mais les patients qui n'en ont rien à ficher de votre manque de confiance, mais ces personnes qui n'y ont jamais cru.... lâcher, ça leur aurait fait trop plaisir, je suis une manquée.... on verra bien...
et ce regard, celui d'une mère, dur, infaillible.... pas un encouragement cette année, les fois où j'osais exprimer des doutes quand à mon avenir devant elle pas un mot de réconfort, mais des doutes supplémentaires.... pas de confiance, juste des murs. Comment ai-je pu m'acharner autant toutes ces années, à coup de lettre, implorant un pardon mais pourquoi? pour quelle faute? Mes visites s'espacent, se limitent aux obligations liées au terrain de stages, je ne recherche plus de réconfort de sa part, plus d'encouragement, plus qu'elle voit quoi que ce soit. et même ds la merde je me tais, elle en sourirait.... je sais, une mère on en a qu'une... je répondrais juste une vie aussi, y'en a qu'une!
et je ne le comprenais pas jusque là....
à ma jardinière.....je continue avec toi... :kilou: :coeuranime: :jongler:
