5ème jour de crise consécutif. Et demain ?

[Margot38r]

Bonjour,

Je m’appelle Margot, j’ai 28 ans et je souffre d’anorexie et de boulimie depuis 10 ans. En 10 ans de maladie, je me rends compte que je n’ai jamais échangé avec une personne souffrant de la même maladie que moi. Alors j’ai décidé de vous écrire via ce forum.
Après 40 jours sans crises, j’ai rechuté vendredi dernier. J’enchaîne les crises depuis 5 jours. Les 40 jours sans crises étaient une période de restriction sévère. Mon corps avait faim alors la boulimie a pris le contrôle. Donc je mange. Depuis 5 jours je mange des quantités astronomiques de nourriture. Je rempli ce corps qui a crevé de faim pendant 40 jours. Je mange jusqu’à être malade, je mange jusqu’à l’épuisement.
Les crises se finissent tard dans la nuit et je me jure que le lendemain ça sera terminé et qu’il n’y aura plus de crises. Mais le lendemain, la boulimie en pilote automatique répète encore et encore le même schéma. Acheter, rentrer à la maison, manger. Manger jusqu’à être malade. Manger jusqu’à l’épuisement. C’est une lutte. Je me bats contre la voix de la boulimie. Je la supplie d’arrêter, je la supplie de me laisser tranquille. La voix m’insulte, ne m’écoute pas et elle prend les choses en main. Elle me rassure en me disant que la nourriture nous protège, que la nourriture est un cocon dans lequel rien ne peut nous arriver. Alors je cède. C’est plus simple. Je lui donne raison. Je laisse la boulimie prendre le contrôle. Pour un jour de plus. Je ne lutte plus. Je n’ai plus la force. Je n’ai pas l’énergie de me batte face à elle. Je la laisse remplir le corps. Le corps n’a plus faim. Il est malade, gonflé, fatigué, amorphe. Et moi je le déteste le corps car en 5 jours il a pris du poids. Il n’est plus moi. Je le déteste mais la boulimie elle s’en fout. La boulimie est là pour remplir le corps. Jours après jours. Et c’est tout. Elle répète le schéma. Elle décide. Elle a le contrôle.
Je veux que ça s’arrête. Je veux casser ce cercle. Je n’en peux plus. Je ne peux pas tenir un jour de plus à faire des crises. Je n’en peux plus. Mon corps n’en peut plus non plus. Je viens chercher de l’aide. Comment briser le cercle ? Comment chasser la boulimie ? Comment remonter à la surface ?
Aujourd’hui, 5eme jour, je commence à avoir des pensées très sombres car je ne trouve pas de solutions pour m’extirper de cette phase boulimique. Je vous demande de l’aide.
Je vous remercie infiniment. Prenez soin de vous.

[Erzsie]

Bonsoir Margot,

Je dirai que malheureusement, tu es dans le schéma-type de la boulimie. Tu te prives énormément, et logiquement, quand tu craques, tu as très faim donc tu manges sans pouvoir t'arrêter. C'est parce que tu te prives à outrance qu'ensuite tu manges à outrance.
Mais ça, tu en es consciente car tu le dis très bien.

Pour moi, la seule solution, ce serait de ne plus te priver. S'il n'y a plus de privation excessive, tu auras moins de raisons de manger de façon excessive.
Alors je me doute que l'idée de ne plus te priver te fait peur, tu penses que ça te fera grossir. Mais en réalité, ce qui fait grossir, ce sont les alternances de privation et de compulsions. Sans compter que quand ton corps est en mode famine, il se sent en danger, alors dès que tu lui apportes un peu (ou beaucoup) de nourriture, il risque de se mettre à stocker pour anticiper la prochaine phrase de diète.

Essaie déjà de manger seulement quand tu as faim (mais mange avant d'être affamée, de ne plus en pouvoir). Essaie aussi de manger très lentement, en savourant vraiment chaque aliment. Manger lentement et attentivement, c'est la meilleure méthode que j'ai trouvée pour faire céder les crises de boulimie.
Pour y arriver, je me concentrais sur chaque bouchée, et j'essayais de la mâcher au moins 15 ou 20 fois. Je n'y suis pas arrivée tout de suite, pas tout au long du repas, mais peu à peu, ça a marché.

Je suis certaine qu'une des clés (pas la seule, évidemment), c'est de remettre de la lenteur dans l'acte de manger, car lors des crises de boulimie, on mange à toute allure, et c'est ce qui fait manger trop.

Je ne nie bien sûr pas toute la part psychologique qu'il y a dans les TCA, et certainement faut-il essayer de résoudre tout ce qui se cache derrière les crises. Mais je crois aussi qu'il y a une approche plus "pratique", plus concrète, qui peut faire beaucoup de bien.

J'espère de tout cœur que prochainement, tes crises vont s'atténuer.
Bonne soirée à toi.