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Anorexie d’un homme de 42 ans

Par : Martial

Il m’est très pénible de reconnaitre, mais surtout d’accepter le fait que je suis anorexique. Avant de poursuivre cette missive, je dois vous avouer que tout ce qui concernait cette maladie me laissait auparavant dans une indifférence totale.
Ignorance ou pur égoïsme de ma part, je vous laisse juge.
A ce jour, ma vision des choses à bien changée, étant moi même pris dans cet engrenage.
Je suis surpris par la jeunesse de la plupart d’entre vous. J’ai 42 ans, et je vous prie de croire que j’ai du vécu à mon actif, j’ai beaucoup de peine de constater que des adolescents, voir des enfants subissent de telles souffrances.
J’aimerais tant pouvoir vous apporter mon aide, mon soutien… mais je suis dans l’immédiat incapable de me sortir moi même de cette situation qui me détruit chaque jour un peu plus.

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Actuellement contraint à ne plus avoir le droit de travailler (décision irrévocable de mon employeur), je dispose de mes journées, pour faire le point sur ce qui m’a conduit à une telle déchéance. Pour cela, il faut remonter 4 ans en arrière; à cette époque, j’étais heureux, sans soucis, mes seules priorités étaient de tout mettre en ouvre pour apporter le bonheur à mon épouse et mes 4 enfants.
J’étais ce que l’on nomme couramment un « battant ». Je faisais face aux problèmes à « bras le corps ». J’étais animé d’une certaine fierté d’avoir réussi ma vie. J’aimais, et à travers cet amour, rien ne pouvait m’atteindre…

Mais le bonheur est éphémère. Adultère, divorce et soudain tout s’effondre, tel un château de cartes. Pourquoi cette trahison ? Je n’ai pas trouvé de réponse. Je n’aurais jamais imaginé que l’être que j’aimais le plus au monde, puisse être capable d’une telle vilénie.

Vous comprenez maintenant les raisons qui font que je me retrouve en ce moment devant ce clavier d’ordinateur à chercher une entrée en contact avec vous. Je refuse que l’on me plaigne, j’ai simplement besoin d’une écoute, si furtive soit-elle, elle m’apportera un grand soutien. Il m’est difficile de vous demander cette aide vu votre jeunesse et les souffrances que vous devez également endurer.
Mais, vers qui d’autre me tourner ? Un petit mot de votre part m’apporterait un peu de réconfort, et vos conseils seraient pour moi du plus grand intérêt.
Je suis conscient de ce qui peut résulter du fait de cette anorexie, mais je suis incapable d’y remédier. Je suis si fatigué, qu’il m’arrive de ne plus avoir envi de poursuivre, ni même d’envisager avec sérénité l’hospitalisation qui est prévue pour le mois de Septembre.

La solitude est ma nouvelle compagne. Mes enfants me manquent tellement. Arriverais-je un jour à pardonner à celle qui fut mienne, le mal qu’elle m’a fait ? Je le souhaite, car je serais alors en paix avec moi même, et peut-être alors reprendrais-je goût à la nourriture.
J’ai eu une courte mais conséquente période de boulimie, avec une prise de poids excessive. Puis, cette « orgie de bouffe » à fait place à l’anorexie. Sournoisement, elle s’est installée. Je ne me suis pas rendu compte de ce qui m’arrivait. Lorsque je l’ai réalisé, il était déjà trop tard. Pour être tout à fait honnête, je refusais tout simplement d’admettre la vérité.

Les symptômes ne se sont pas fait attendre. Vomissements, sang dans les urines, pertes de connaissance puis coma. Ces […] kg perdus en 8 mois m’ont complètement transformé, tant sur le plan physique que mentalement. Je me découvre une personnalité que je ne me soupçonnais pas d’avoir. Dépressions multiples, (T.S) répétées, humeur exécrable, accompagné d’actes de violence verbale,incontrôlés, vis à vis de certaines personnes de mon entourage (collègues et famille) qui jugent sans la moindre once de désir de compréhension. Elles n’ont aucun scrupuleà me qualifier d’aliéné mental. Mais les paroles qui me blessent le plus, et qui me font sortir de mes gons, sont : « Il n’aime pas ses enfants, sinon il mangerait. » Cette intolérance et ces remarques sarcastiques me blessent au plus profond de mon âme.
Quand la sagesse fait défaut, l’absurde prend le pas sur l’incompris.
Je ne m’étendrai pas plus sur ce que je vis au quotidien car vous devez être confronté a des réalités similaires ou pires encore. Et au final, ce sont peut-être eux qui sont dans le vrai…
Je me pèse plusieurs fois par jour, c’est une véritable obsession. Chaque grammes perdus, me confrontent à cette réalité, jamais je m’en sortirai. Je haïs ce corps qui ne m’appartient plus. La laideur est en moi, c’est elle qui me nourri. Cette déchéance humaine est le reflet de mon image. Cette image de moi même que je n’ose plus regarder.
La vue, l’odeur de la moindre denrée alimentaire provoquent en moi des nausées, des sueurs, des tremblements.

Je mens à ma meilleure amie sur mon état de santé. L’intention est certes honorable (je ne souhaite pas attiser son inquiétude ni ne veux de sa pitié), mais quel ami digne de ce nom peut faire cela, et se sentir coupable n’excuse rien.
Je dissimule mon extrême maigreur en enfilant plusieurs vêtements les uns sur les autres (comme j’ai froid en permanence), ça ne me dérange pas trop. J’ai même été jusqu’à me cacher dans les toilettes pour endosser ma tenue de travail, afin que mes collègues ne puissent me dévisager. La honte m’habite en permanence.
Il y a une dizaine de jours, lors d’une conversation, un quidam m’a donné 60 ans.
Cela vous donne un aperçu de mon physique. Il est vrai que la chute des cheveux, est l’état de ma dentition de ces derniers mois y sont pour quelque chose.

Voila, vous connaissez maintenant quelques traits de mon histoire. J’ai passé la nuit sur le site sans m’en rendre compte, à lire vos témoignages, qui m’ont beaucoup touchés. A ingurgiter du café (c’est la seule chose qui passe), et à fumer des « clopes » (3 paquets/jour),comme à mon habitude. Je sais, il y a de l’abus, mais que voulez vous, à mon âge, on ne se refait pas. (P.S ne suivez pas ce mauvais exemple).
Je vous souhaite bonne réception de cet « intermède » de ma vie, qui n’est certes pas très reluisante, mais la sincérité n’est pas toujours agréable à entendre, je l’ai appris à mes dépends.

Bonne journée à tous et à toutes. Courage, et bonne chance pour la suite.
Dans l’espoir d’avoir bientôt de vos nouvelles.

Martial, alias etèop
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Article écrit par Martial


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